

Si le logiciel libre et les communs numériques constituaient la meilleure piste à envisager pour reconquérir notre souveraineté numérique ? Tristan Nitot prend la parole sur le sujet.
Le média de ceux qui réinventent l'entreprise
GAFAM… quelle définition se cache sous cet acronyme ?
Également connu sous l’appellation de «Big Five», ou encore de «The Five», ce regroupement d’entreprises déchaîne bien des passions.
Comprendre la définition de GAFAM implique donc de saisir ce qui constitue leur essence, à savoir une puissance et une influence sans commune mesure dans l’histoire de l’industrie.
On vous dit tout.
L'acronyme GAFAM s’est formé à partir de la première lettre des cinq entreprises qui dominent actuellement le marché du numérique, c’est-à-dire :
Si ces géants du web n’évoluaient pas initialement sur le même terrain (même si, comme nous le verrons, les lignes tendent à bouger), ils sont regroupés sous une même entité tant ils partagent certains traits communs :
Notons que lorsque l’on évoque les colosses du numérique, d’autres acronymes sont souvent souvent cités en parallèle.
Le terme GAFA, le premier à entrer dans l’usage collectif, correspond à GAFAM, mais sans le «M» de Microsoft.
Mais petit à petit l’entreprise de Bill Gates et Paul Allen a rejoint les autres acteurs. Et si nous ne pouvons identifier d’élément déclencheur précis, beaucoup s’accordent à dire que cette intégration a opéré au moment de la diversification de ses activités, notamment avec le développement de services aux entreprises et aux particuliers (offres de cloud computing, acquisition de LinkedIn, rachat du jeu vidéo Minecraft, etc.).
L'acronyme NATU reprend les premières lettres des entreprises :
Pourquoi un tel regroupement ? Car ces sociétés sont souvent identifiées comme les futurs GAFAM, et partagent la même croissance fulgurante ainsi qu’un modèle économique disruptif.
Les BATX sont les GAFAM chinois, c’est-à-dire les entreprises :
Ces dernières ont émergé en grande partie en raison des mesures restrictives et protectionnistes de la Chine, engendrant une quasi-absence des GAFAM sur le territoire.
La plupart des GAFAM ont émergé entre le dernier quart du XXe siècle et le début des années 2000 (Amazon a été créée en 1994, Google en 1998 et Facebook en 2004). Et en à peine vingt ans, elles ont acquis une puissance inédite, devenant les véritables leaders du monde numérique.
Comment se traduit la puissance économique des GAFAM ?
Pour le dire simplement, les GAFAM sont partout.
Quelques exemples :
Côté mobile, Android de Google et iOS d’Apple constituent la très grande majorité des systèmes d’exploitation de nos smartphones.
En parlant d’Amazon, la firme est actuellement n°1 sur la vente de livres électroniques.
Notons enfin que les mastodontes du numérique ont aussi emprunté la voie vers l’univers vidéo ludique (rachat de la plateforme Twitch par Amazon en 2014, Xbox Game Studios appartenant à Microsoft, etc.).
Mais la puissance économique des GAFAM se traduit également par une politique «expansionniste». Ils se trouvent désormais là où on ne les attendait pas initialement.
À titre d’illustration, citons :
Et les GAFAM ne sont pas prêts de s’arrêter en si bon chemin. Objets connectés, intelligence artificielle… les technologies de pointe se révèlent un domaine dans lequel il reste tant à accomplir, et où ils comptent bien récupérer leur part du gâteau.
Le profit généré par les GAFAM est toujours aussi impressionnant. En effet, en janvier 2020, les cinq entreprises ont dépassé ensemble la barre des 5000 milliards de dollars en bourse, ce qui représente près de 2,4 fois l’intégralité du CAC 40. D’ailleurs, leur valorisation boursière dépasse… le PIB du Japon !
Quant au chiffre d’affaires de ces sociétés, il atteint jusqu’à plusieurs centaines de milliards de dollars :
Chacune des entreprises des GAFAM occupe une position dominante dans son propre secteur d’activité, laissant peu de place à des concurrents de taille. Pourquoi ?
Enfin, forts de leur présence à l’international, les GAFAM rusent en optant pour l’optimisation fiscale. L’exemple le plus illustre reste la localisation d’un siège social en Irlande, pays réputé pour offrir une politique avantageuse en matière d’imposition.
Néanmoins, ce sentiment de surpuissance des GAFAM ne tient pas que de leur pouvoir économique. Leur influence grandissante dans les sphères sociale et politique inquiète de plus en plus.
Comme le dit un adage bien connu :
Si c’est gratuit, c’est que c’est vous le produit.
En d’autres termes, la puissance financière des GAFAM (ou une partie) se nourrit des données personnelles des internautes, lorsqu’ils diffusent du contenu en ligne, effectuent des recherches, des achats, et même quand ils utilisent des assistants vocaux et autres objets connectés.
Conséquence, les GAFAM nous profilent dans le but de :
Mais cette influence va encore plus loin, car pour certains experts nos modes de vie, notre manière d’appréhender le monde et notre libre arbitre seraient menacés par les GAFAM.
Pendant longtemps l’opinion publique s’est inquiétée de leur puissance économique. Désormais c’est leur influence politique qui inquiète.
Il y a certes les actions de lobbying entreprises par les géants du numérique :
En 2017, les GAFAM dépensent ensemble la somme record de 50 millions de dollars en lobbying, en tant que groupes de pression, auprès du gouvernement américain (Google 18 millions ; Amazon près de 13 millions ; Facebook 11,5 millions et Apple 7 millions).
Mais c’est surtout leur accès à une quantité considérable de données qui peut avoir un impact fort sur la conscience politique des internautes, et donc sur le principe même de démocratie. En témoignent l’affaire Facebook-Cambridge Analytica, et le scandale qu’elle a occasionné lorsqu’il a été dévoilé que les informations personnelles de 87 millions d’utilisateurs du réseau social ont été recueillies dans l’objectif d’influencer les intentions de vote.
En somme, les GAFAM peuvent manier la data pour influencer la manière de présenter et diffuser l’information en ligne. Sur Facebook par exemple, l’engagement (et donc les commentaires) prime. De ce fait, le média pousse en majeure partie des contenus jouant sur l’affect, les peurs et la polémique. Et diffuse donc une vision biaisée du monde qui nous entoure.
Une étude a montré que chaque terme d'outrage moral ajouté à un tweet augmentait le taux de retweets de 17 %. Autrement dit, la polarisation de nos sociétés fait partie du business model.
Vous l’aurez compris, la définition des GAFAM implique de comprendre tous les enjeux économiques, sociétaux et politiques qui entourent cette notion...
… et donc de s’intéresser à la manière de réagir face à une telle suprématie.
L’émergence du concept de souveraineté numérique est une réponse à ce constat. Taxe GAFAM, réflexions sur leur démantèlement, mesures de régulation, politiques de soutien aux acteurs européens du numérique… se révèlent autant de pistes régulièrement abordées.